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Mens agitat molem
"L'humanité vit à l'état de guerre sous des lois païennes et barbares.
Le pouvoir émane du dit « droit divin » des rois qui n'est autre que la force militaire brutale. Le conflit des ambitions égoïstes et étriquées lance les hommes contre les hommes avec son cortège de déchirements, de morts. Ce fléau est le triomphe de la force aveugle ... L'extinction de cette agitation fébrile et de ces feux passionnels ne peut être réelle que par la grande Paix de Dieu ... La seule paix qui puisse élever l'homme.
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- Seigneur chevalier, votre volonté de concorde universelle est louable mais pourrez-vous transformer le cœur de chaque individu ?
- Ami Guillaume, il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs, tout problème bien posé est à moitié résolu ... Mens agitat molem (L'esprit meut la masse - Virgile Enéide).
Le seul pouvoir absolu est celui qui s'exerce sur les âmes car c'est le seul qui ne puisse être combattu. Une conjuration peut abattre un despote mais ne peut rien sur une croyance établie car elle est la solide charpente qui abrite toute civilisation. Les sentiments manifestés par un peuple sont toujours simples et très exagérés. Cette simplification et cette exagération le préservent du doute et de l'incertitude. Habilement suggestionnés les peuples sont capables d'héroïsme, de dévouement et de désintéressement. Toujours ils respecteront une charité violente parce que l'homme est impressionné par la force et non par la faiblesse ...
Pour le bonheur des peuples, nous imposerons un Temple d'amour débordant de force vitale, de volonté intense et de pensée droite qui sera la fleur de l'idéal humain. Son empire sur les âmes sera alors absolu. L'esprit le plus indépendant ne songera pas à s'y soustraire. Les hommes d'action le réaliseront, les législateurs l'appliqueront, les artistes le traduiront selon leur sensibilité. Portés par cet élan, l'envieux et l'imbécile seront libérés du sentiment de leur nullité et se fondront dans ce Temple de justice, d'harmonie sociale, dont la foi éclairée par la lumière de l'Esprit sera le soleil de l'intelligence et de l'amour ...
Mais avant que ce Temple puisse gouverner le monde dans une parfaite sérénité, il faudra s'armer de beaucoup de patience et attendre que les vaniteux perdent haleine. Aucun ne possède le souffle nécessaire, ils n'ont pas les moyens de leurs prétentions. La prospérité repose sur la paix et sur le revenu domanial.
Alors que le roi de France (Philippe IV Le Bel, dit le faux monnayeur) devrait vivre du sien, il est réduit à des expédients pitoyables pour satisfaire sa soif de domination. Afin de payer en sacs d'or les galères qu'il arme et régler la solde de ses soudards, il taille les juifs, il décime les biens ecclésiastiques, il presse les bourgeois, il force les clercs. Ne reculant devant rien, il falsifie les espèces en changeant le titre du métal, inonde le royaume de mauvaise monnaie, la noire (Par rapport à la blanche monnaie sa teneur en argent fin est tombée de plus de moitié masquant ainsi une dévaluation de 205%), son "florin à la masse" et son "royal dur" (Nommé ainsi parce que sous la dent on sent que le métal est moins malléable que l'or fin à 24 carats du "petit royal") sur lequel ses sujets se cassent les dents. Comme le métal se raréfie il interdit (En mars 1295) l'exportation de la vaisselle d'or et d'argent ainsi que le droit d'en acheter à quiconque n'a pas six mille livres tournois de rente. De plus il force à porter à la fonte le tiers de la vaisselle détenue par les particuliers. Cette année, son appétit grossissant, la ponction s'enfle, il veut la moitié. Il exige même, sans contrepartie, la totalité de la vaisselle de ses baillis ... "
(Source : "Sol ponens" - page 123 - de René-Yves Deniel)
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